Dans un coin d’la cuisine de la maison d’campagne
se retranche, ventru, le buffet de mémé.
Il s’ouvre et il se ferme depuis l’aube de son âge,
pour laisser passer plats et préparer dîner.
Serviteur silencieux de toute la famille
en lui, bien ordonnées, les casseroles roupillent
et la fonte se morfond mijotant des festins
ou de simples repas qui resserrent nos liens
En bois lourd et grinçant, en mode passé de temps,
à peine dégrossi cousu de grosses planches
solidement cloutées, la façade vernissée
fardée de quelques fleurs naïvement sculptées
Je le vois féminin, ce buffet fatigué
à tout organiser pour nourrir tout son monde
à ne plus y penser, tant ainsi va la ronde,
avec ses hanches trop rondes et son bois joli teint
Tu fais partie des meubles, je ne t’aime pas vraiment
mais c’n’est pas pour autant que t’es pas important
Ta serrure a joué il nous faut soulever
le poids de ta porte brute pour refermer l’huis
On ne veut pas t’abîmer, mais enfin les choses s’usent,
et quel morceau de bois pourrait te remplacer ?
Il n’aurait ni le charme, ni l’histoire de céans
dans les nœuds de son bois incrusté gentiment
qui marquent comme rides la maison de famille
Miette